Batia Suter

23.10.2021
09.01.2022

Domestic Night /Dark Pages

Domestic Night/Dark Pages est une installation qui réunit près de 100 impressions jet d’encre et une collection de pages perdues provenant de vieux livres et magazines. Batia Suter, qui a créé une première fois l’installation Domestic Night en 2018, revisite pour le MBAL sa collection d’images provenant d’ouvrages trouvés aux puces. Depuis plus de 30 ans, l’artiste pense en images. Fascinée par les livres illustrés, atlas, imprimés scientifiques, catalogues, livres d’art, et revues en tout genre, elle collecte, accumule, classe les images qu’elle extrait de ces publications souvent démodées. Une fois les images patiemment collectées et classées, Batia Suter les scanne puis les monte et les assemble jusqu’à ce que de nouvelles relations visuelles surgissent.

Dans ses compositions, Batia Suter fait dialoguer culture savante et culture populaire. Elle s’intéresse autant aux images scientifiques, issues par exemple de l’astronomie et réalisées dans des conditions techniques très complexes, qu’à la publicité ou aux manuels pour motos ! Les images réunies dans Domestic Night ont été sélectionnées pour leur côté sombre – au sens littéral. L’artiste a retenu ici des reproductions presque noires. Une fois les pages scan- nées, l’artiste découvre par l’agrandissement de nouveaux détails dans les zones sombres des reproductions. L’outil numérique lui permet ainsi de naviguer à l’intérieur des images, les scans révélant toutes sortes d’anomalies comme des poils, des éraflures et des variations infinies de saturation qui entrent en conflit visuel avec le sujet. Les explorations visuelles de Batia Suter nous parlent non seulement de représentations (comment un objet est photo- graphié) mais aussi d’encre (comment une image est imprimée). Toujours décontextualisées et hors d’usage, les images réunies par l’artiste pour leur seul motif, développent alors de nouvelles narrations.

L’artiste a complété son installation en réunissant sous vitrine des pages de livres également sorties de leur contexte. Là aussi elle crée de nouvelles relations visuelles avec le noir comme seul fil conducteur. Les pages extraites de leur livre d’origine apparaissent sans aucune information, celles-ci étant désormais manquantes. L’œuvre de Batia Suter se situe à l’opposé du travail d’archivage scientifique qui cherche à maîtriser le passé. Sa collection de pages détachées et décontextualisées serait un véritable cauchemar pour les bibliothécaires !

Née en Suisse, vivant et travaillant à Amsterdam, Batia Suter (1967) crée une œuvre qui se déploie sous la forme d’installations monumentales réalisées à partir d’images trouvées qui se fondent par juxtaposition. Ses livres Parallel Encyclopedia (2007) et Parallel Encyclopedia #2 (2016) sont composés d’images tirées de vieux livres qu’elle a collectés au fil des ans. Surface Series (2011), Radial Grammar (2018) et Hexamiles (2019) montrent d’autres explorations visuelles. Cherchant à faire communiquer les images selon leur propre logique, l’artiste crée des séries qui donnent de nouvelles vies aux images imprimées – sa matière créative.