SECONDE PEAU
Chez Emma Lucy Linford, le vêtement devient symbole de protection. Son travail plastique s’articule autour de la notion de “re-vêtement”. Il s’agit du vêtement comme seconde peau, celle que l’on endosse, et que l’on enlève en fonction des besoins, mais surtout celle qui nous protège et nous abrite. Aussi bien vitrine de l’intime que marqueur social pour les autres, il fait office de messager du corps qu’il recèle. Tentatives d’existence et de résistance, notamment contre les diktats sur l’esthétique du corps, les pièces de l’artiste lausannoise sont autant des couches protectrices pour le corps que des artifices ou encore des reflets de l’esprit qui s’y cache. En fil de laiton ou en sac poubelle crocheté, ses œuvres délicates et aériennes flottent dans l’espace, donnant une impression de légèreté. C’est par l’exploration de la technique du crochet qu’Emma Lucy Linford donne naissance à son langage plastique. Cette installation – composée de deux pièces en suspension – constitue une réflexion sur l’identité et le statut de l’artiste au sein de la société contemporaine. Si la première (L’artiste (ou le tombeau), 2020), à mi-chemin entre un sarcophage et un cocon de protection pour le corps, a été réalisée en plein confinement, la seconde (Le boudoir, 2021) – réalisée une année plus tard – a été pensée par l’artiste en écho à cette dernière, comme un refuge. Toutes deux faites sur mesure, elles représentent chacune à leur manière une couche de protection pour l’intégralité du corps, dans laquelle l’artiste peut se retirer en toute intimité ou le vide intérieur s’y voir sublimé. Car quand l’artiste n’y est pas, son corps n’est que suggéré, uniquement perceptible par le vide qu’il forme, flottant dans l’espace. Emma Lucy Linford nous renvoie symboliquement à l’idée du « vêtement » comme une protection de l’âme.
Emma Lucy Linford (Suisse, 1992) vit et travaille à Lausanne. Après une année à l’Ecole Nationale supérieure de Beaux-Arts à Paris, elle obtient un bachelor en design d’architecture d’intérieur à la Haute Ecole d’art et de design(HEAD) à Genève en 2015. Ses travaux ont été notamment présentés lors d’expositions collectives en 2018 aux Ateliers de Bellevaux, puis au MUDAC – Musée cantonal de design et d’arts appliqués contemporains (Lausanne) et au Museo Villa dei Credi (Bellinzone) en 2020. Et plus récemment, à la Galerie C (Neuchâtel) en 2021et à Valentin61 (Lausanne) en 2022.