The Shape of An Answer
Artiste mythique du 20e siècle, Louise Bourgeois sert d’emblème au féminisme. En s’intéressant à son œuvre gravé, le MBAL dévoile une facette plus intime de l’artiste, surtout connue pour ses sculptures, notamment par ses araignées monumentales. Plus de 50 gravures, datant des années 1940 à 2010, offrent un éclairage singulier sur le processus créatif de l’artiste. Corps, maternité, couple ou encore transidentité sont des sujets récurrents chez Bourgeois, à découvrir dans cette exposition.
Louise Bourgeois explore la gravure sous toutes ses formes depuis le début de sa carrière. Pratique rapidement devenue indispensable pour l’artiste, elle s’y adonne durant deux périodes distinctes. En 1938, lorsqu’elle s’installe à New York où elle imprime ses planches sur une petite presse à la maison tout en élevant ses enfants. Puis dès 1988, elle rencontre des imprimeurs et éditeurs spécialisés et entreprend alors d’importants projets d’impressions. Souvent réalisées sous forme de séries, ses nombreuses gravures dévoilent un aspect intime et attachant qui se présente, comme des récits, et permettent de suivre son processus créatif. Elle privilégie le burin ou la pointe sèche, délaissant progressivement l’aquatinte. Son trait, net et implacable, délimite ses gravures sur un fond épuré. Avec la gravure, le textile et les travaux d’aiguille, qui renvoie à la période de son enfance durant laquelle elle était chargée de réparer des tapisseries pour aider ses parents, Bourgeois a également illustré des textes, à commencer par les siens. Toute sa vie, l’artiste a eu une pratique d’écriture prolifique, notamment lors de sa psychanalyse (1950-1960). Son écriture simple, poétique et souvent autobiographique fait écho à son attrait pour la puissance du langage lorsqu’il est associé à l’image. Bourgeois décrit sa relation à l’art comme une thérapie, une lutte contre les traumatismes et l’anxiété qui ne s’apaise que par sa production. Elle exorcise son passé et ses souffrances en utilisant ses souvenirs d’enfance comme matériel de création et aborde les questions de genre et des thèmes universels tels que le sexe, l’anxiété, la mort, la solitude et la douleur. Elle reconnaît ouvertement sa vulnérabilité, l’accepte comme une force qui nourrit son travail et donne forme à sa souffrance. Cette dépendance enchevêtrée marque la singularité de Bourgeois, dont la phrase est devenue célèbre: «L’art est une garantie de santé mentale».
L’exposition est réalisée grâce aux prêts généreux de collections publiques et privées : Galerie Lelong (Paris), Fondation Beyeler (Riehen/Bâle), Musée Jenisch – Cabinet cantonal des estampes, collection de l’État de Vaud (Vevey), Musée d’Art et d’Histoire (Genève). Le commissariat est assuré par Séverine Cattin, conservatrice.
Louise Bourgeois, The Maternal Man, 2008, Archival dyes printed on cloth, 26.6 x 20.3 cm. Photo: Christopher Burke © The Easton Foundation / 2021, ProLitteris, Zurich